Grall Institute Formations
Grall & associés gagne le trophée d'argent du droit pour la distribution
Retour à la page publication Flashs concurrence

N°4 – PANORAMA DES PREMIERS AVIS DE LA CEPC POUR L’ANNÉE 2016

Avis n° 16-1 sur le caractère impératif des délais de paiement dans le cadre d’un contrat international

Est-il possible d’écarter l’application des dispositions de l’article L.441-6 du Code de commerce plafonnant les délais de paiement à un contrat international de vente de marchandises conclu entre un fournisseur français et un client étranger (établi dans un Etat membre de l’Union européenne) lorsque ce contrat est soumis à la compétence du juge et de la loi de l’Etat étranger dans lequel le client est établi ?

Telle était la question posée à la CEPC au regard des nouvelles sanctions de nature administrative relatives aux délais de paiement mises en place par la loi Hamon du 17 mars 2014 et la loi Pinel du 18 juin 2014.

Pour répondre à cette question, la CEPC s’est interrogée sur la subordination de l’application dans l’espace d’un texte assorti de sanctions administratives aux instruments du droit international privé, c’est-à-dire aux règlements « Rome I » et « Rome II ».

Après avoir relevé que le jeu des sanctions administratives ne devrait souffrir a priori aucun conflit de lois ou de juridictions en raison de l’exclusion de la matière administrative par les règlements applicables, la CEPC affirme que les sanctions administratives n’ont vocation à s’appliquer que si l’obligation litigieuse est soumise au droit français.

La CEPC rappelle à cet égard que la qualification contractuelle ou extra-contractuelle de l’obligation litigieuse dépend de l’objet de l’action. Du point de vue du droit européen, la qualification contractuelle semble l’emporter aux yeux de la CEPC.

Cependant, la CEPC s’est évertuée à envisager les deux qualifications.

Au terme de sa démonstration, la CEPC résume sa position par la conclusion suivante :

« En l’état du droit positif, on peut penser que les sanctions administratives qui viennent assortir le dépassement des délais impératifs de paiement pourront être mises en œuvre dans les rapports entre un vendeur français et un acheteur étranger malgré la soumission du contrat à la loi interne d’un Etat étranger, notamment lorsque l’ensemble de la relation commerciale se déroule en France.
En revanche, en présence d’une clause attributive de juridiction désignant une juridiction étrangère et d’une clause d’electio juris désignant une loi étrangère, le juge étranger saisi d’une action de nature civile garde les mains très libres pour refuser de tirer les conséquences civiles de la violation du droit français.
Il ne pourrait en aller différemment que si – en dépit de l’établissement à l’étranger de l’acheteur – l’ensemble de la relation commerciale se déroulait en France. » ?

? ? ?

Avis n° 16-2 sur les conditions commerciales d’une offre de services de transport

Une entreprise exerçant son activité dans le secteur de la location de véhicules de courte durée a souhaité recueillir la position de la Commission sur la conformité au droit de pratiques liées à l’activité de plateformes en ligne mettant en relation des personnes désirant louer un véhicule (particulier ou utilitaire) avec des loueurs en vue de la conclusion d’un contrat de location au prix de un euro incluant, selon les cas, 24 ou 48 heures de location sur un trajet déterminé et pour un kilométrage fixé, ainsi qu’une assurance « tous risques » selon les indications portées sur les sites internet.

On retiendra que la CEPC considère que cette activité de mise en relation, par voie électronique, de personnes désirant louer un véhicule et de professionnels de la location est susceptible, lorsqu’elle repose sur des offres de location à un euro, de contrevenir à l’interdiction des prix abusivement bas fixée à l’article L.420-5 du Code de commerce.

En outre, lorsqu’elle s’accompagne d’une présentation insuffisamment claire des conditions de cette offre (destination, kilométrage, assurance, …) et donc susceptible d’induire en erreur le consommateur, elle peut constituer un acte de concurrence déloyale.

Enfin, la Commission estime que l’obligation faite aux loueurs de proposer la location au prix uniforme de un euro apparaît contraire à l’interdiction des prix imposés et pourrait également constituer une entente anticoncurrentielle. ?

? ? ?

Avis n° 16-3 sur les pratiques contractuelles en matière d’équipement de publipostage

Cet avis fait suite à une saisine par un GIE de médecins libéraux à propos de difficultés rencontrées dans l’exécution d’un contrat de location et de maintenance d’un équipement de publipostage conclu avec un fournisseur.

Dans le cadre de cet avis, la CEPC rappelle deux conditions d’application des dispositions de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce.

D’une part, celui qui invoque ce texte doit être un « partenaire commercial ». A ce titre, la CEPC observe que deux arrêts ont admis l’application de l’article L.442-6-I, 2° du Code de commerce à une société civile de moyens d’avocats (arrêt de la Cour d’appel de Paris du 7 juin 2013) et à des relations entre avocats (arrêt de la Cour d’appel d’Angers du 24 avril 2012). Elle conclut donc, dans la lignée de cette jurisprudence, qu’un GIE de médecins libéraux constitue un partenaire commercial lequel est en droit de bénéficier des dispositions sanctionnant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

D’autre part, la CEPC rappelle que la caractérisation d’un déséquilibre significatif est subordonnée à la vérification de l’absence de négociation entre les parties, exercice impossible à réaliser en l’espèce faute d’information suffisante. ?

? ? ?

Avis n° 16-4 sur l’existence d’un délai légal de transmission de nouveaux tarifs à ses clients

L’application d’un changement de tarif par l’offreur de biens ou de services à son client est-elle assujettie au respect d’un délai ?

Pour répondre à cette interrogation, la CEPC distingue deux cas de figure, selon que le changement de tarif résulte ou non de l’application d’une clause d’indexation.

  • Dans l’hypothèse où une clause d’indexation est présente au sein du contrat, la CEPC rappelle que le fait de prévoir la révision du prix par application d’une telle clause est licite au regard des articles L.112-1 et suivants du Code monétaire et financier dès lors que l’indice choisi est en relation directe avec l’objet du contrat ou avec l’activité de l’une des parties. En ce cas, et conformément à la loi des parties, le nouveau tarif résultant de l’indexation s’applique dans les conditions prévues par la clause d’indexation sans qu’un délai de prévenance ait à être respecté, à moins que les dispositions contractuelles aient requis le respect d’un tel délai.
  • En l’absence de toute clause d’indexation, la CEPC se contente de réitérer la position de la DGCCRF exprimée dans sa note d’information du 22 octobre 2014 relative à l’application de la loi Hamon : l’offreur peut proposer une modification de ses tarifs, sous réserve de respecter les engagements contractuels et de ne pas contrevenir aux articles L.441-7, L.441-8 et L.442-6, I, 12° du Code de commerce, ce dernier visant le fait de « facturer une commande de produits ou de prestations de services à un prix différent du prix convenu résultant de l’application du barème des prix unitaires mentionné dans les conditions générales de vente, lorsque cellesci ont été acceptées sans négociation par l’acheteur, ou du prix convenu à l’issue de la négociation commerciale faisant l’objet de la convention prévue à l’article L.441-7, modifiée le cas échéant par avenant, ou de la renégociation prévue à l’article L.441-8 ».

La CEPC précise enfin que dans le cas où la relation entre les parties peut être considérée comme une relation commerciale établie au sens de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce et où le changement de tarif entraîne une modification sensible pour le client, ce dernier n’est pas tenu de l’accepter et il peut considérer qu’il y a rupture partielle de la relation et demander par voie de conséquence un délai de prévenance en considération de la durée de ladite relation. ?

? ? ?

Avis n° 16-5 concernant les pratiques commerciales dans le transport fluvial : qualification des pratiques au regard de l’article L.442-6 du Code de commerce

Après avoir présenté de manière exhaustive le secteur du transport fluvial de marchandises et ses différents opérateurs ainsi que les relations commerciales nouées entre ces derniers, la Commission souligne l’existence de pratiques issues d’un manque de transparence et de pratiques susceptibles d’engendrer un déséquilibre entre les parties.

Sans rentrer dans le détail de ces pratiques spécifiques au secteur du transport, nous retiendrons les préconisations de la CEPC susceptibles de s’appliquer plus généralement aux relations nouées entre un prestataire de services et son client.

La CEPC estime ainsi que « la première étape d’une négociation réussie passe donc par la rédaction des CGV ».

A cet égard, la CEPC rappelle le contenu des conditions générales de vente, à savoir :

« – les conditions de vente […] ;
– le barème des prix unitaires proposé, c’est-à-dire l’ensemble des éléments significatifs permettant aux parties de déterminer précisément le prix de la prestation ;
– les réductions de prix : le prestataire doit préciser les critères précis et objectifs selon lesquels il accorde au client des réductions et rabais ;
– les conditions de règlement : le prestataire doit prévoir les délais de règlement qui peuvent être librement fixés entre les parties dans le cadre de la négociation dans la limite des règles édictées à l’article L441-6 du code de commerce. Il doit prévoir également les pénalités de retard, les indemnités forfaitaires complémentaires pour frais de recouvrement et les modalités de règlement. »

Le rôle et la portée des conditions générales d’achat (CGA) sont ensuite précisés par la Commission :

« Le donneur d’ordre, client du transporteur, négocie le transport de marchandises et est en droit de prévoir des conditions particulières, notamment dans un cahier des charges annexé à un appel d’offre ou en éditant des conditions générales d’achat (CGA). Il peut proposer ses CGA au transporteur lesquelles peuvent compléter ou contredire les CGV. Le prestataire n’a pas l’obligation d’accepter les CGA proposées par son client. En cas de refus par le prestataire des CGA, ce sont les CGV qui s’appliquent à la relation d’affaires. »

Ainsi que le relève la CEPC, la négociation contractuelle doit débuter par la remise par le prestataire de service de ses CGV au client afin d’avoir un point de départ. Il est ici fait référence aux dispositions de l’article L.441-6 du Code de commerce selon lesquelles les conditions générales de vente constituent le socle unique de la négociation commerciale. La Commission précise cependant que la « négociation doit également s’appuyer sur l’expression des besoins du client en matière de prestations de services ».

Une fois la négociation finalisée, la CEPC rappelle que la relation contractuelle doit faire l’objet d’une convention afin de formaliser la négociation commerciale conformément aux dispositions de l’article L.441-7 du Code de commerce. Ajoutons toutefois que la formalisation prévue par cet article ne s’applique qu’en cas de revente d’un produit en l’état (sur ce point voir notamment les avis n° 16-6 et 16-7).

Enfin, s’agissant de la facturation des prestations de services, l’avis souligne la possibilité pour les parties de recourir au mandat de facturation :

« Dans le cadre de la relation commerciale, il peut arriver que le prestataire de services confie au client le soin de procéder à la facturation. On parle de mandat de facturation ou d’autofacturation. Le client établit alors matériellement les factures pour le compte du prestataire de services. Cette possibilité est encadrée par l’article 289, alinéa 2, du I et l’article 242, nonies, de l’annexe II du Code Général des Impôts. Dans ce cas, un mandat de facturation doit être conclu entre le client et le prestataire. Il peut en être fait état dans le contrat qui sera signé entre les parties. Le contrat de mandat de facturation fixe les modalités d’établissement de la facturation.

Il importe de souligner que toute facture émise pour le compte du prestataire doit faire l’objet d’une acceptation de ce dernier. Le prestataire doit alors vérifier l’exactitude des factures émises pour son compte. Il conserve l’entier exercice de ses obligations de facturation et en assume les conséquences. » ?

? ? ?

Avis n° 16-6 sur l’application des dispositions de l’article L.441-7 du Code de commerce dans les relations entre, d’un côté, une centrale de référencement et, de l’autre, les membres d’un réseau

La saisine avait pour objet de déterminer si un réseau de distribution de restauration rapide doit ou non respecter les dispositions de l’article L.441-7 du Code de commerce qui imposent la conclusion entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services d’une convention écrite indiquant « les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale ».

En l’espèce, le réseau offre trois types de prestations aux consommateurs : un service de livraison à domicile, un service de vente à emporter et un service de restauration sur place.

Une centrale de référencement négocie, pour les affiliés du réseau, avec les fournisseurs les quatre familles de produits suivants :

  • les produits d’équipement des points de vente non destinés à la revente ;
  • les produits alimentaires destinés à être transformés ;
  • les produits alimentaires non destinés à être transformés mais reconditionnés dans les points de vente avec des emballages spécifiques ;
  • les produits alimentaires revendus en l’état, notamment les boissons en canettes et bouteilles.

Pour les trois premières familles de produits mentionnées, dans la mesure où il ne s’agit pas de revente de produits en l’état, la CEPC considère que les dispositions de l’article L.441-7 du Code de commerce ne s’appliquent pas.

Concernant la quatrième famille (produits alimentaires revendus en l’état), la CEPC se réfère à l’avis n° 13-01 rendu à la suite de la saisine d’une fédération professionnelle dans le secteur de l’hôtellerie. Par cet avis la CEPC avait considéré que : « les cafés, hôteliers, restaurateurs (CHR) ne lors que dans le cadre de leurs activités, ils transforment les produits qu’ils revendent à leurs clients dans le cadre d’une prestation de service globale (service par un personnel qualifié, ambiance,…). Dans ces conditions les dispositions de l’article L 441-7 du Code de commerce ne trouvent pas à s’appliquer dans la relation unissant les entrepositaires grossistes aux CHR et a fortiori pour la fourniture de « produits boissons » ».

La CEPC estime que ce dernier avis est applicable en l’espèce tant en ce qui concerne l’activité de restauration sur place que l’activité de livraison à domicile et de vente à emporter.

La Commission relève ainsi que :

« le point déterminant est que la revente des produits en l’état comme les boissons s’inscrit bel et bien dans une prestation de service globale dans laquelle le client se voit remettre ou livrer chez lui, par coursier, un repas complet. La revente en l’état de produits alimentaires apparaît donc comme un élément accessoire d’une prestation de service globale ».

 En conséquence, les affiliés d’un réseau de distribution de restauration rapide ne sauraient être qualifiés de distributeurs ou de prestataires de services au titre de l’article L.441-7 du Code de commerce et la centrale de référencement n’aura donc pas à établir une convention annuelle unique avec les fournisseurs pour les différentes familles de produits considérés. ?

? ? ?

Avis n° 16-7 sur l’application de l’article L.441-7 du Code de commerce aux relations entre un fabricant d’appareils domotiques et des installateurs, artisans électriciens

Dans la lignée de l’avis n° 16-6, la CEPC considère que les artisans électriciens qui procèdent à la vente et à l’installation d’appareils domotiques ne peuvent être considérés comme des distributeurs au sens de l’article L.441-7 du Code de commerce. En conséquence, ils ne sont pas soumis à la conclusion d’une convention écrite annuelle avec leurs fournisseurs pour l’achat de ces produits.

En effet, la Commission relève que les appareils domotiques doivent obligatoirement être installés dans les immeubles pour pouvoir être utilisés. Or, en l’espèce, l’artisan ne se contente pas de revendre ces matériels en l’état (dans leur conditionnement d’origine par exemple), mais les revend dans le cadre d’une prestation globale incluant leur installation et leur mise en fonctionnement (en assurant le scellement et les branchements nécessaires).

Ainsi que le constate la CEPC, « le matériel n’est donc pas revendu dans le même état que celui dans lequel il a été acheté au fournisseur puisque l’artisan électricien a ajouté une prestation qui rend ce matériel directement utilisable par l’acheteur ». ?

? ? ?

Avis n° 16-8 sur l’application de l’article L.442-6, I, 3° du Code de commerce aux relations carrossiers – assureurs

Aux termes de l’article L.442-6, I, 3° du Code de commerce :

« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : […] 3° D’obtenir ou de tenter d’obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l’assortir d’un engagement écrit sur un volume d’achat proportionné et, le cas échéant, d’un service demandé par le fournisseur et ayant fait l’objet d’un accord écrit ; ».

L’article L.442-6, I, 3° du Code de commerce peut s’appliquer aux sociétés anonymes d’assurance, aux sociétés d’assurance mutuelles régies par le Code des assurances et aux plateformes de gestion de sinistres enregistrées au répertoire des métiers, mais ne peut s’appliquer aux mutuelles d’assurance régies par le Code de la mutualité.

La CEPC considère que l’obtention par les sociétés anonymes d’assurance, les sociétés d’assurance mutuelles régies par le Code des assurances et les plateformes de gestion de sinistres enregistrées au répertoire des métiers, d’un avantage consistant en une remise sur les tarifs des réparateurs considéré comme une condition préalable à la passation de commandes de prestations de réparation, non assorti d’engagement écrit sur un volume d’achat prévisionnel proportionné, engage leur responsabilité civile.

Une solution est proposée par la CEPC : substituer aux remises sur les tarifs des réparateurs des remises conditionnelles ou des ristournes de fin d’année calculées sur le chiffre d’affaires réalisé. ?

>