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Lettre sept.-18 – Pratiques restrictives en droit de la concurrence, Droit de l’agence commerciale et Antitrust

La lettre de l’actualité en droit économique septembre 2018 – Pratiques restrictives en droit de la concurrence, Droit de l’agence commerciale et Antitrust.

Jean-Christophe Grall – Avocat Droit de la Concurrence
Guillaume Mallen – Avocat Droit de la Concurrence


 

 I – PRATIQUES RESTRICTIVES EN DROIT DE LA CONCURRENCE

Déséquilibre significatif (article L.442-6, I, 2° du Code de commerce)

• Cour d’appel, Paris, 13 juin 2018, n°15/14893

Thématiques : Déséquilibre significatif (non)
– Concession exclusive – Absence de soumission à des obligations déséquilibrées.
A l’occasion d’un litige en rupture brutale des relations commerciales établies, un concessionnaire exclusif de matériels agricoles invoquait le déséquilibre significatif à l’encontre de son concédant concernant la clause de résiliation du contrat par laquelle les parties pouvaient convenir de mettre fin à l’exclusivité six mois après la notification de la rupture. La mise en œuvre de cette clause aboutissait à ce que le concessionnaire ne soit plus tenu à une obligation d’exclusivité de la marque du concédant. A l’inverse, le concédant disposait de la faculté de nommer un ou plusieurs distributeur(s) ou autres futurs concessionnaires sur le territoire défini.

Pratiques restrictives en droit de la concurrence
Le concessionnaire soutenait qu’il avait été soumis à un déséquilibre significatif, la soumission étant selon lui rapportée par l’existence d’un rapport de force déséquilibré dans le cadre de la relation commerciale et eu égard à sa
« dépendance » à l’égard du concédant.
Ce litige est l’occasion pour la Cour d’appel de Paris de rappeler sa jurisprudence récente, rendue notamment dans l’affaire « ITM » le 20 décembre 2017 concernant les éléments constitutifs du déséquilibre significatif et, plus particulièrement, sur la nécessité de rapporter la preuve d’une soumission ou d’une tentative de soumission d’une partie sur l’autre, condition faisant à présent l’objet d’une appréciation exigeante.
Il est ainsi jugé que « l’insertion de clauses dans une convention type ou un contrat d’adhésion qui ne donne lieu à aucune négociation effective des clauses litigieuses peut constituer ce premier élément [à savoir, la soumission ou la tentative de soumission] ». En l’espèce, le fait que la clause litigieuse ait fait l’objet d’un avenant au cours de la relation commerciale et a été insérée dans un nouveau contrat en 2005 ne « saurait suffire à établir que le concédant a soumis ou tenté de soumettre son concessionnaire ». En effet, le concessionnaire ne démontre pas « qu’il aurait fait part de réserves à l’égard de la clause » ou qu’il n’aurait pas pu la refuser de « peur de remettre en cause la continuité de la relation exclusive ». Il ne démontre pas non plus que le concédant aurait subordonné la poursuite des relations à l’acceptation de la clause litigieuse ou ne lui aurait ménagé aucune possibilité de négociation. La demande est donc rejetée.
La jurisprudence rendue sur le fondement du déséquilibre significatif se veut désormais plus restrictive que par le passé, amoindrissant dans le même temps la protection des fournisseurs.

• Cour d’appel, Paris, 6 juin 2018, n°16/08019

Thématiques : Entrée en vigueur de la LME
– Exigence de soumission ou de tentative de soumission (non)
Les dispositions de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce ne sont applicables qu’aux contrats conclus à compter du 1er janvier 2009. Le contrat litigieux conclu entre les parties avait été, en l’espèce, conclu en 2006 de sorte que le demandeur ne pouvait se fonder sur les dispositions précitées, inapplicables au moment de la conclusion du contrat. S’agissant du renouvellement du contrat intervenu tacitement le 31 décembre 2009 – date à laquelle l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce était alors pleinement applicable – la Cour d’appel constate que le demandeur ne fournit aucun élément de nature à caractériser le délit et « se garde de caractériser l’un des éléments essentiels constitutifs de l’infraction de déséquilibre significatif, soit la soumission du partenaire commercial, par pression, contrainte, menace ou suggestion, se contentant d’affirmer ne pas avoir eu de réel pouvoir de négociation »

• Cour d’appel, Paris, 6 juin 2018, n°16/10621

Thématiques : Franchise commerciale – Déséquilibre significatif (non)
Dans le cadre d’un litige en matière de franchise commerciale dans le secteur du prêt-à-porter féminin, le franchisé invoquait la nullité du contrat de franchise au regard, notamment, de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce. Il soutenait que son franchiseur lui avait imposé contractuellement des obligations de commandes au titre de 12 collections annuelles ainsi qu’un volume d’achat par référence au volume de commandes de l’année précédente, ce qui avait abouti à la mise en place d’un système d’approvisionnement totalement inadapté et qui avait contribué à sa déconfiture.
Au regard des éléments d’espèce, la Cour d’appel de Paris juge que la clause litigieuse par laquelle le franchisé s’engage à disposer d’un stock d’un volume important de produits, notamment ceux des collections en cours, est stipulée en des
« termes généraux » et n’est donc pas susceptible de créer un déséquilibre significatif entre les obligations des parties. Le déséquilibre significatif est donc écarté, de façon quelque peu lapidaire par la juridiction, ce que l’on observe hélas bien souvent dans le cadre de contentieux entre entreprises privées, en dehors de toute action ou intervention du Ministre de l’économie. Cette espèce est toutefois l’occasion de montrer que le déséquilibre significatif est aujourd’hui invoqué de façon quasi-systématique par les entreprises et potentiellement applicable à bon nombre de situations de distribution, comme le cas de la franchise commerciale.

• Cour d’appel, Paris, 16 mai 2018, n°17/11187

Thématiques : Renégociation postérieure à la conclusion de la convention annuelle – Déséquilibre significatif (oui)
– Champ d’application de l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce – Exigence de soumission ou de tentative de soumission
Postérieurement à la signature de la convention annuelle avec certains de ses fournisseurs, Système U avait tenté d’imposer à ces derniers (ou leur avait d’ailleurs tout bonnement imposé) de nouvelles réductions de prix, unilatéralement ou par l’usage de menaces ou de moyens de rétorsion, sans aucune contrepartie. Il était reproché à Système U d’avoir commis à l’encontre de ses partenaires un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Outre la confirmation des principes dégagés dans l’affaire « Galec » (CA Paris, 1er juillet 2015, confirmé par : Cass. com. 25 janvier 2017), l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris est ici très éclairant quant au champ d’application de l’article L.442- 6, I, 2° du Code de commerce.
Faisant preuve d’une pédagogie accrue dans ses décisions, la Cour d’appel de Paris rappelle tout d’abord que la libre négociabilité tarifaire se traduit notamment par la possibilité pour le fournisseur, de convenir avec le distributeur des conditions particulières de vente (dites « CPV »). Mais les obligations auxquelles les parties s’engagent en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale doivent être formalisées dans une convention écrite. C’est cette formalisation qui permet à la DGCCRF d’exercer un contrôle a posteriori sur la négociation commerciale et sur les engagements pris par les cocontractants. Le principe de la libre négociabilité des conditions de vente et des tarifs, qui n’est pas sans limite, est en effet encadré par les dispositions de l’article L.442-6 du Code de commerce qui sanctionnent civilement un certain nombre de pratiques abusives dans les relations fournisseurs/distributeurs. A l’instar de l’affaire « Galec », il est également rappelé que la fixation du prix est le résultat des obligations réciproques prises par le fournisseur et le distributeur au cours de la négociation commerciale et la réduction de prix accordée par le fournisseur doit avoir pour cause l’obligation prise le distributeur à l’égard du fournisseur, c’est-à-dire que toute obligation prise doit avoir une contrepartie.
Mais la décision apporte aussi quelques précisions nouvelles d’importance. Il est ainsi jugé que les principes exposés ci- dessus sont également pleinement applicables aux négociations sur le prix des produits réouvertes ultérieurement à la signature du contrat-cadre annuel, visant alors explicitement l’hypothèse de la renégociation en cours d’année qui, si elle est licite en soi sous forme d’avenants, doit nécessairement garantir la préservation de l’équilibre commercial. Or, le fait d’imposer des réductions de prix, unilatéralement ou par l’usage de menaces ou de moyens de rétorsion, non convenues dans la convention cadre annuelle, sans aucune contrepartie, bouleverse nécessairement et de manière significative l’équilibre des droits et obligations des parties. De plus, il est heureux de lire dans la décision et de façon univoque que l’article L.442-6, I, 2° du Code de commerce permet certes de sanctionner des clauses contractuelles abusives mais également des pratiques en matière de négociation ou de renégociation, comme c’était le cas en l’espèce. Le déséquilibre significatif peut donc être sanctionné qu’il trouve sa source dans les stipulations contractuelles d’un contrat (ce qui est traditionnellement le cas) ou qu’il s’inscrive en périphérie de celui-ci. Notons que la Cour d’appel de Paris confirme ici la solution qu’elle avait dégagée, le 18 mars 2015, dans l’affaire
« Cuisine Pratic » dans laquelle une pratique et non une clause, en l’occurrence le refus d’un fabricant de mettre à disposition de son concessionnaire une nouvelle gamme de produits, avait été sanctionnée.

Après avoir analysé la situation de chaque fournisseur et procédé à l’analyse de l’exigence de la soumission ou de la tentative de soumission la Cour d’appel conclut au déséquilibre significatif pour seulement deux fournisseurs et condamne Système U à une amende de 300.000 €.

Rupture brutale de relations commerciales établies (article L.442-6, I, 5° du Code de commerce)

• Cour d’appel, Paris, 4 juillet 2018, n°18/07354

Thématiques : Litige international – Clause attributive de compétence
Confirmant une solution jurisprudentielle bien établie, la Cour d’appel de Paris confirme, dans un litige franco-belge, la pleine efficacité des clauses attributives de compétence conclues valablement au regard de l’article 25 du Règlement (UE) n°1215/2012 (dit « Bruxelles I ») quand bien même l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce serait invoqué au fond par le demandeur.
En l’espèce (et c’est un grand classique), le concessionnaire français éconduit invoquait le caractère impératif de la compétence exclusive des juridictions spécialisées en matière de rupture brutale des relations commerciales pour mettre en échec la clause attributive de compétence convenue entre les parties et désignant un juge étranger. La Cour d’appel de Paris réfute cette analyse et conforte l’argumentation du concédant, lequel indiquait qu’en matière de litiges internationaux, seules les règles de conflit de juridiction doivent être mises en œuvre pour déterminer la juridiction compétente, des dispositions impératives constitutives de lois de police seraient-elles applicables au fond du litige. Elle en conclut ainsi que « l’application de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce au fond du litige n’écarte pas, dans les relations commerciales internationales, les clauses attributives de compétence au profit de juridictions non spécialisées ».
Cependant, cette solution ne vaut qu’à la condition que la clause attributive de compétence soit bien conforme aux prévisions de l’article 25 du Règlement « Bruxelles I ». C’est pourquoi, en l’espèce, la Cour d’appel de Paris a procédé à l’analyse de la conformité de la clause et notamment à son opposabilité. Elle rappelle à cette fin que la « première condition d’opposabilité d’une clause de prorogation de compétence réside dans son acceptation par les parties. En l’absence de contrat écrit entre les parties manifestant expressément leur accord, celui-ci peut résulter tacitement, en matière commerciale, d’usages ou d’habitudes des parties. C’est ainsi que le paiement réitéré de factures au dos desquelles la clause de prorogation de compétence est imprimée peut démontrer son acceptation par le partenaire auquel elle est opposée » (En ce sens déjà : CA Paris, 20 septembre 2017, n°16/05033 – dans le cadre d’un litige franco-belge).
En l’espèce, le concédant prétendait que ses CGV avaient été reprises sur les courriels et les confirmations de commandes et que son partenaire avait donc eu parfaitement connaissance de la clause attributive de compétence contenue dans lesdites CGV. Or, le concédant ne versait aux débats aucune facture comportant au verso ses CGV, ses factures ne s’y référant que par une simple mention. Il est en effet indiqué sur celles-ci la mention selon laquelle les conditions générales sont « disponibles sur demande ». Selon la Cour d’appel de Paris, cette seule mention ne saurait en soi démontrer la communication, au concessionnaire, des conditions générales de vente et, a fortiori, sa connaissance de celles-ci. Partant, la clause attributive de compétence est déclarée inopposable.
Au terme de ce raisonnement, la Cour d’appel de Paris tire les conséquences de cette inopposabilité en déterminant la compétence juridictionnelle au regard des principes généraux posés à l’article 7 du Règlement « Bruxelles I », lesquels supposent de qualifier l’action en cause selon qu’elle est de nature contractuelle ou de nature délictuelle. L’exercice est périlleux car la nature délictuelle ou contractuelle de l’action en rupture brutale dans les litiges internationaux fait l’objet d’un vif débat depuis maintenant quelques années, notamment depuis l’arrêt « Granarolo » de 2014 rendu par la CJUE (CJUE 14 juillet 2016, aff. C-196/15, Granarolo).
Dans l’espèce commentée, la détermination de la nature de l’action était indifférente puisqu’elle conduisait, dans les deux cas, à la compétence des tribunaux français. Bien que cela n’aurait rien changé sur la solution rendue, il nous apparaît regrettable que la Cour d’appel n’ait pas pris le soin de qualifier la nature contractuelle ou délictuelle de l’action en cause, au regard de l’article 7 du Règlement « Bruxelles I ». C’est dire si la question demeure sensible en droit international de la rupture brutale des relations commerciales établies !

• Cour d’appel, Paris, 4 juillet 2018, n°15/20409

Thématiques : Appel d’offres – Précarité de la relation – Caractère établi (non)
Des relations commerciales avaient été nouées à partir de l’année 2004 entre une société commercialisant des vêtements de prêt-à-porter et un fabricant de vêtements auprès de qui elle passait commande de textiles pour chaque saison de l’année suivante. Malgré une interruption d’une année, les relations s’étaient poursuivies jusqu’en 2012. Constatant l’arrêt de toute nouvelle commande, le fabricant a assigné son partenaire sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce. La société commercialisant les vêtements considérait que les relations commerciales n’étaient pas établies, notamment en raison de la mise en concurrence à laquelle elle procédait systématiquement s’agissant de ses fournisseurs de textiles.

Il est tout d’abord rappelé le principe constant selon lequel « la société qui se prétend victime de [la] rupture doit établir au préalable le caractère suffisamment prolongé, régulier, significatif et stable du courant d’affaires ayant existé entre elle et l’auteur de la rupture, qui pouvait lui laisser augurer, compte tenu des circonstances, que cette relation avait vocation à perdurer ». C’est bien à l’aune de cette condition liée à la croyance légitime dans la pérennité des relations commerciales du partenaire qui se prétend évincé, qu’il convient d’apprécier si la relation était ou non « établie ».
Or, en l’espèce, le fabricant n’était pas en mesure de justifier de cette « croyance légitime » dès lors que les relations commerciales revêtaient un caractère précaire et que leur poursuite était aléatoire, du fait, d’une part, de la mise en concurrence et d’autre part, de la nature même des produits développés par la société commercialisant les vêtements de prêt-à-porter.
S’agissant de la mise en concurrence « permanente » avec d’autres fournisseurs, il est ainsi souligné que le fabricant, « qui s’y soumettait en présentant ses articles en pleine connaissance de cause, ne pouvait raisonnablement escompter que cette relation se poursuivrait nécessairement dans l’avenir, peu important à cet égard les formes de cette mise en concurrence et notamment l’absence de recours à une procédure d’appel d’offres ou à l’organisation de rencontres « physiques » entre fournisseurs, dès lors que cette mise en compétition existait ». Il en ressort que ce processus adopté par les parties et usuel dans ce secteur particulier de la vente de vêtements comportait, par essence, un aléa pour le fabricant.
Concernant la nature même des produits vendus, il est relevé que l’entreprise qui produit, fabrique et vend en gros des articles textiles, et qui travaille avec des enseignes de la grande distribution, est inévitablement exposée, par la nature même de son activité, à des fluctuations liées aux tendances éphémères de la mode.

Notons que la Cour d’appel de Paris qui exclut, pour ces deux raisons, le caractère établi des relations commerciales prend toutefois le soin de préciser (à titre surabondant) qu’en l’espèce, le chiffre d’affaires développé par le fabricant avec son partenaire au cours de la relation commerciale, n’avait été ni stable ni régulier mais fluctuant, ce qui n’aurait donc certainement pas permis, non plus, de caractériser une relation établie.

• Cour d’appel, Paris, 20 juin 2018, n°16/07386

Thématiques : Précarité de la relation (non)
– Notion de relations commerciales « établies »
La négociation du prix lors de chaque commande ne rend pas la relation commerciale précaire. En l’espèce, l’existence de factures permet d’établir la présence d’un courant d’affaires continu et significatif pendant presque deux ans, ce qui permet d’établir l’existence d’un courant d’affaires continu et significatif qui caractérise suffisamment l’existence de relations commerciales établies.

• Cour d’appel, Paris, 29 juin 2018, n°17/04838

Thématiques : Sanctions – Principe de non- cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle
A l’occasion de la rupture d’un contrat conclu entre la firme Toshiba et un prestataire de maintenance de matériels électroniques, ce dernier considérait que Toshiba avait rompu brutalement le contrat et avait donc engagé une action contentieuse sur le fondement de l’ancien article 1147 du Code civil (responsabilité contractuelle) mais également sur le fondement de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce (responsabilité délictuelle en droit interne), ce cumulativement et non subsidiairement. La Cour d’appel de Paris confirme la décision des premiers juges qui ont considéré que la demande était irrecevable au regard du principe de non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle. En l’espèce, la demande d’indemnisation concernait en effet le même fait générateur, en l’occurrence la rupture du contrat.

• Cour d’appel, Paris, 27 juin 2018, n°16/08334

Thématiques : Rupture brutale des relations commerciales établies – Prescription quinquennale de l’action
Le point de départ du délai de prescription quinquennale d’une action en réparation de la brutalité d’une rupture de relation commerciale établie correspond au jour où celui qui s’en prétend victime a été avisé de la rupture. En l’espèce, le courrier de rupture a été reçu par la société X le 17 septembre 2009, ce qui signifie qu’elle avait jusqu’au 17 septembre 2014 pour agir à l’encontre de la société Y. Or, l’assignation ayant été délivrée par la société victime de la rupture le 2 avril 2015, soit postérieurement à l’expiration du délai de prescription de l’action, celle-ci est prescrite.

• Cour d’appel, Paris, 14 juin 2018, n°17/07253

Thématiques : Litige international – Clause attributive de compétence
Une société française avait souscrit un compte vendeur sur la plateforme Amazon pour commercialiser ses accessoires pour produits électroniques sur les sites européens d’Amazon, activité gérée par la société Amazon Services Europe (société de droit luxembourgeois). Les documents contractuels conclus entre le vendeur, d’une part, et la société Amazon Services Europe, d’autre part, étaient tous soumis au droit luxembourgeois et à la compétence des juridictions luxembourgeoises.
Après avoir clôturé le compte du vendeur pour différents motifs, ce dernier a assigné deux sociétés du groupe Amazon en référé devant le juge français, notamment sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales établies. Si le juge français s’est reconnu compétent, il a toutefois dit n’y avoir pas lieu à référé. Le vendeur a alors interjeté appel.
Un énième débat autour de la compétence du juge français s’ouvrait alors devant la Cour d’appel de Paris, très souvent saisie de questions internationales en matière de rupture brutale.
Le Président du Tribunal de commerce s’était en l’espèce déclaré compétent au motif que l’action du vendeur avait été portée en référé et non au fond et qu’elle était basée sur la responsabilité délictuelle des sociétés Amazon sur le fondement de l’article L.442-6 du Code de commerce, de sorte que les clauses attributives de compétence territoriale stipulées dans les contrats liant les parties étaient inopposables. Suivant ce raisonnement, le Président de la juridiction consulaire faisait alors application de l’article 5.1 du Règlement « Bruxelles I » (aujourd’hui 7.1 du Règlement « Bruxelles I bis ») qui attribue la compétence du juge du lieu du fait dommageable, en l’espèce la France.
Vigoureusement contestée par Amazon, cette analyse apparaissait quelque peu datée au regard de la jurisprudence pourtant bien établie sur ce point, ce que la Cour d’appel de Paris n’a pas manqué de soulever.
En l’espèce, tant le contrat « Amazon Services Europe Business Solutions » que le contrat « utilisateur » conclus entre le vendeur et les deux sociétés du groupe Amazon prévoyaient la compétence des tribunaux luxembourgeois en visant que « tout litige, de quelque manière que ce soit », serait porté devant ces juridictions. Selon la Cour d’appel, les demandes formulées par le vendeur au titre notamment de la rupture brutale des relations commerciales, entrent bien dans le champ d’application de ces clauses. Il est ici fait application d’une position classique de la jurisprudence rendue en droit international de la rupture brutale. Pour être applicable, la clause doit être rédigée de manière suffisamment large pour englober les litiges portant sur la rupture du contrat.

Mais pour être effective, la clause doit surtout respecter les exigences de l’article
25 du règlement (UE) n°1215/2012 (« Bruxelles I bis »), applicable depuis le 10 janvier 2015 et qui autorise les parties à convenir d’une prorogation de compétence sous certaines conditions.
En l’espèce, la prorogation de compétence était parfaitement valable et opposable au vendeur français. Le juge français était donc incompétent pour statuer sur les demandes du vendeur.
Notons également que la Cour d’appel de Paris neutralise une argumentation bien souvent soutenue par les demandeurs qui consiste à prendre appui sur la nature délictuelle de l’article L.442-6 du Code de commerce en droit interne pour mettre en échec les clauses attributives de compétence au profit d’un juge étranger.
Comme le relève à juste titre la Cour d’appel, cette argumentation ne saurait être accueillie dans la mesure où il a déjà été jugé, notamment par la Cour de cassation, qu’une clause attributive de compétence visant tout litige ou différend né du contrat ou en relation directe avec celui-ci est applicable dans le cadre d’un litige international né d’une demande fondée sur l’article L.442-6 du code de commerce.
En d’autres termes, la nature de l’action de la rupture brutale dans un contexte international est parfaitement indifférente quant à l’effectivité d’une clause attributive de compétence.
Afin de clore son raisonnement sur ce point, la Cour d’appel relève, de façon plus critiquable, que la CJUE a dit pour droit, dans l’arrêt du 14 juillet 2016 (l’affaire « Granarolo »), qu’une action indemnitaire fondée sur une rupture brutale de relations commerciales ne relève pas de la matière délictuelle ou quasi délictuelle au sens du Règlement « Bruxelles I » s’il existe entre les parties une relation commerciale « établie » ( ?), ce qu’elle juge être le cas en l’espèce compte tenu des contrats conclus entre le vendeur et les sociétés du groupe Amazon. Il s’agit probablement d’une erreur de plume car la CJUE, dans l’arrêt « Granarolo », ne parle pas de « relation commerciale établie » mais de relation commerciale « tacite ». Il convient en effet de rappeler que la CJUE a énoncé, dans cette question préjudicielle, qu’une action indemnitaire fondée sur une rupture brutale des relations commerciales de longue date relève de la matière contractuelle au sens du Règlement « Bruxelles I » s’il existe, entre les parties, une « relation commerciale tacite ».

• Cour d’appel, Paris, 13 juin 2018, n°15/09789 et n°15/09790 (deux espèces)

Thématiques : Caractère établi des relations commerciales (non) – Inapplicabilité du texte
Dans le cadre d’un litige en rupture des relations commerciales, la société Nouvelle Laiterie de la Montagne (SNLM) soutenait que les relations commerciales qu’elle entretenait avec un producteur de lait avaient débuté en 1993, soit une durée de 19 ans au jour de la rupture intervenue le 1er avril 2002, ce qui aurait justifié selon elle un préavis de 18 mois. La SNLM se prévalait notamment de la continuité et de la stabilité de la relation commerciale établie à l’origine en 1993 entre le producteur de lait et la société La Laiterie de la Montagne (SLVA) aux droits de laquelle était venue la Société Laitière des Monts d’Auvergne (SLMA) le 5 mai 2007, la SNLM venant aux droits de cette dernière à compter du 1er janvier 2012.
La Cour d’appel de Paris rejette cette argumentation. Elle rappelle qu’il appartient à la SNLM de rapporter la preuve, à tout le moins, que depuis le 1er janvier 2012, date de son entrée directe en relation commerciale avec le producteur de lait, ce dernier avait eu l’intention de poursuivre avec la SNLM les relations commerciales qu’il entretenait avec la SLMA depuis 2007. Or, en l’espèce, cette preuve n’est pas rapportée. C’est en vain que la SNLM prétend qu’elle vient nécessairement aux droits de la SLMA car le contrat de lait lui aurait été cédé par le cédant. Cette prétendue cession de ce contrat n’a pas en effet, selon la Cour d’appel, de plein droit substitué le cessionnaire au cédant dans les relations contractuelles et commerciales que ce dernier entretenait avec le producteur de lait.
En l’espèce, la relation commerciale entre la SNLM et le producteur de lait avait débuté le 1er janvier 2012 et s’était terminée le 30 mars 2012, soit seulement trois mois. Or, des relations commerciales de trois mois ne sauraient caractériser une relation commerciale établie au sens de l’article L.442-6, I, 5° du code de commerce.

• Cour d’appel, Paris, 13 juin 2018, n°15/09464

Thématiques : Exception à l’exigence d’un préavis – Faute grave (non) – Précarité des relations (non)
Un distributeur avait rompu sans préavis le contrat de distribution portant sur des cires à greffer pour les vignes. Contestant le grief de rupture brutale des relations commerciales qui lui était opposé par le fournisseur, le distributeur justifiait la baisse de ses achats auprès de son partenaire en raison de sa politique tarifaire, qui ne lui avait pas été communiquée en temps utile. Le distributeur tentait également de neutraliser l’application de l’article L.442-6, I, 5° du Code de commerce en invoquant le caractère précaire des relations commerciales compte tenu notamment de l’absence de contrat écrit depuis 2006 et d’une renégociation tarifaire annuelle.
S’agissant du caractère précaire des relations commerciales, il est constaté que les parties avaient conclu un premier contrat de distribution exclusive le 1er septembre 1985, qui avait été renouvelé annuellement jusqu’à la conclusion d’un second contrat le 29 avril 2002. Si à compter de 2006, aucun contrat-cadre n’avait été conclu, cela ne saurait suffire en soi à l’exclure l’application de l’article L.442-6, I, 5° du code de commerce. Il résulte en effet des faits de la cause que la relation commerciale entre les parties a été marquée par une grande stabilité, les chiffres d’affaires annuels ayant très peu varié depuis 2007. Par ailleurs, le seul fait qu’il ait existé une renégociation systématique annuelle des tarifs (en l’espèce, non prouvée), est insuffisant à caractériser des relations précaires.
S’agissant de la prétendue communication tardive des tarifs du fournisseur au distributeur, il est jugé que si le fournisseur avait certes transmis tardivement ses tarifs annuels au distributeur, aucun élément du dossier ne permettait toutefois de montrer que la communication des prix à une date précise était impérative pour le distributeur. En effet, le distributeur n’avait pas indiqué au fournisseur que le défaut de communication de la tarification induirait la cessation des relations commerciales, ni n’a réagi auprès de lui quant à la formalisation tardive d’une offre définitive de prix. Dès lors, cette faute ne saurait être considérée comme étant d’une gravité suffisante pouvant justifier une rupture sans préavis des relations commerciales. Compte tenu de la durée des relations commerciales (27 ans), du volume d’affaires et de la progression du chiffre d’affaires, le préavis accordé aurait dû être de 18 mois.

• Cour d’appel, Paris, 13 juin 2018, n°15/14461

Thématiques : Caractère établi des relations commerciales – Caractère prévisible de la rupture
Dans cette affaire, la Cour d’appel procède à des rappels intéressants :
– la renégociation annuelle des tarifs ne s’oppose pas à la qualification de relations commerciales établies, dès lors qu’elle s’inscrit dans une volonté de continuité de celles-ci, démontrée par la persistance d’un flux régulier d’affaires.
– une succession de contrats à durée déterminée caractérise une relation commerciale établie, lorsqu’il en résulte une relation commerciale suffisamment prolongée, régulière, significative et stable, pouvant laisser augurer de la poursuite des relations commerciales.

– le caractère prévisible de la rupture d’une relation commerciale établie ne prive pas celle-ci de son caractère brutal si elle ne résulte pas d’un acte du partenaire manifestant son intention de ne pas poursuivre la relation commerciale et faisant courir un délai de préavis.

• Cour d’appel, Paris, 23 mai 2018, n°16/03854

Thématiques : Indemnisation du préjudice résultant de la rupture brutale – Référence à la marge sur coûts variables
Le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d’affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n’ont pas été supportées du fait de la baisse d’activité résultant de la rupture.

• Cour d’appel, Paris, 16 mai 2018, n°16/03499

Thématiques : Appel d’offres – Notification sans équivoque du recours à une appel d’offres (oui)
La société sportive professionnelle de l’Automobile club de l’ouest (la SSP ACO) organise la course annuelle des 24 heures du Mans. Elle a confié à une société la production audiovisuelle des éditions 2010, 2011 et 2013 des 24 heures du Mans sans qu’aucun contrat écrit ne soit formalisé, les parties travaillant sur devis accepté. Pour les éditions suivantes (2014 à 2016), la SSP ACO a choisi de déconcentrer la production en divisant la prestation globale en quatre lots, attribués à des prestataires différents à la suite d’une mise en concurrence.
Le 30 avril 2013, la SSP ACO a donc notifié à son partenaire la fin de leur partenariat à l’issue de l’édition 2013 des 24 heures du Mans, l’informant qu’elle recourrait pour les éditions 2014 à 2016 à un appel d’offres ouvert à toute entreprise susceptible de répondre au cahier des charges et l’invitant alors à y participer.
Le 29 mai 2013, la société de production a pris acte de la remise en cause du partenariat et a confirmé vouloir participer à l’appel d’offres à venir.
Après plusieurs propositions émises par la société de production et de nombreux échanges avec la SSP ACO sur le contenu de ces propositions, la SSP ACO l’informait, le 6 mai 2014, que sa candidature n’était pas retenue. C’est dans ce contexte que la société de production a assigné son partenaire sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales.
La société de production contestait la date à laquelle était intervenue la rupture et par voie de conséquence, le point de départ du préavis. En effet, selon la partie demanderesse, le courrier du 30 avril 2013 par lequel la SSP ACO dénonçait le partenariat ne comportait aucun préavis.
Selon la Cour d’appel de Paris, il résulte clairement des éléments de fait que le 30 avril 2013, la société SSP ACO a notifié, sans équivoque, à sa partenaire la fin de leurs relations commerciales à l’issue de l’édition 2013, et sa décision de recourir à un appel d’offres pour les éditions 2014 à 2016, ce dont d’ailleurs la société de production a pris acte par courrier du 29 mai 2013, précisant son intention de participer à cet appel d’offres. Dès lors, à compter du 30 avril 2013, la société de production « avait donc pleinement connaissance qu’après l’édition 2013, elle n’interviendrait plus pour l’édition suivante de juin 2014, qui devait avoir lieu 14 mois plus tard, dans les mêmes conditions qu’antérieurement, cette édition ainsi que les suivantes étant soumises à un appel d’offres ».
Cette date constitue donc le point de départ du préavis.
Postérieurement à cette date, s’en est alors suivie une période de relations précaires au cours de laquelle la société de production audiovisuelle a terminé d’exécuter l’organisation de l’édition de juin 2013 des 24 heures du Mans puis a concouru à l’appel d’offres pour les éditions suivantes, en émettant plusieurs propositions. C’est donc en vain que la société de production soutient que, nonobstant la lettre de rupture, les relations commerciales se seraient poursuivies comme chaque année par l’établissement d’un devis, alors qu’il est établi que les propositions de devis qu’elle a formulées, lot par lot, ont bien été demandées et émises dans le seul cadre de l’appel d’offres. Les relations commerciales, à compter du 30 avril 2013, présentaient un caractère provisoire, les faisant nécessairement échapper à l’application de l’article L.442-6, I°,5° du code de commerce.
Enfin, il est souligné qu’aucun élément du dossier ne démontrait l’intention de la SSP ACO de renoncer à recourir à l’appel d’offres et qu’elle avait ainsi entretenu sa partenaire dans l’illusion de la poursuite de la relation commerciale antérieurement nouée.

Obtention d’un avantage disproportionné ou sans contrepartie (article L.442-6, I, 1° du Code de commerce)

• Cour d’appel, Paris, 13 juin 2018, n°18/04602

Thématiques : Avantage disproportionné (oui)
– Fourniture à titre gratuit par le fournisseur au distributeur d’un nombre conséquent d’unités gratuites de ses produits destinés à les faire connaître – Indifférence de la contrainte aux fins de qualification de l’avantage disproportionné au sens du texte
La société ByeByeRacines (ci-après : la société B), société spécialisée dans le commerce de gros de parfumerie et de produits de beauté a mis au point un produit de coloration éphémère visant à maquiller les racines et cheveux blancs. En juin 2015, la société B. a entamé des relations commerciales avec Monoprix en commercialisant ses produits dans certains points de vente cosmétiques de l’enseigne (les « Beauty Monop »).
Compte tenu de la bonne dynamique de vente réalisée sur le produit en question, les parties se sont rencontrées afin d’envisager la possibilité d’étendre la vente du produit aux rayons de parapharmacie de certains magasins. Une proposition commerciale a alors été adressée en ce sens par la société B. à Monoprix.
Avant que ne soit formalisé un premier accord commercial entre les parties pour l’année 2016, Monoprix a alors demandé à son partenaire commercial la livraison de 1 800 unités de produits à titre gratuit pour sa « Box Beauté », soit une valeur totale de
26.000 euros.
Les commandes passées par Monoprix auprès de la société B. n’étant pas au rendez-vous et les relations entre les parties se crispant au fil des mois, la société B. a assigné Monoprix notamment sur le fondement de l’article L.442-6, I, 1° du Code de commerce en considérant que la fourniture de 1800 unités de ses produits à titre gratuit avait procuré à sa cliente un avantage disproportionné compte tenu notamment des commandes ultérieures dérisoires que celle-ci avait passées, lesquelles n’avaient porté que sur 11.112 produits en 2016.
Selon la Cour d’appel, la fourniture à titre gratuit par la société B. à Monoprix de 1 800 unités de produits pour les clients de sa « Box Beauté », à savoir un échantillonnage destiné à faire connaître chacune de ses références, constitue un avantage au sens de l’article L.442-6, I, 1° du Code de commerce. Si cet avantage a été convenu entre les parties, sans avoir été imposé à la société B., cette condition n’est pas requise pour appliquer l’article L. 442-6, I, 1° du Code de commerce. Sans l’indiquer expressément, la juridiction oppose ici l’article L.442-6, I, 1° du Code de commerce à l’article L.442-6, I, 2° du même Code qui sanctionne le déséquilibre significatif, lequel requiert la démonstration d’une soumission ou d’une tentative de soumission à des obligations déséquilibrées ou sans contrepartie.
Or, en l’espèce, la Cour d’appel considère que cet avantage s’avérait disproportionné, tant par rapport aux ventes effectuées en 2015 dans les « Beauty Monop », que par rapport aux achats de la société Monoprix auprès de la société B. en 2016.
En l’espèce, l’opération de promotion portant sur 1.800 produits était d’une très grande ampleur pour la société B., ce qui a engendré pour elle un coût important. Cette participation ne pouvait donc se justifier que dans la perspective de la réalisation des prévisionnels convenus en 2016, lesquels ne pouvaient laisser sérieusement penser à la société B. que Monoprix ne lui commanderait que 11.112 pièces.
Monoprix a donc bénéficié en 2016 de près de 14 % des produits livrés par la société B. à titre gratuit, ce qui constitue un avantage disproportionné.
Enfin, il est relevé que « si la faiblesse du chiffre d’affaires réalisé par le distributeur sur le ou les produits concernés par une action de coopération commerciale pendant la période de référence au regard de l’avantage qui lui a été consenti ou l’absence de progression significative des ventes pendant cette période de référence ne peuvent à elles seules constituer la preuve de la disproportion manifeste, le distributeur n’ayant qu’une obligation de moyen, elles peuvent constituer des éléments d’appréciation de cette disproportion manifeste, à conforter par d’autres indices ». En l’espèce, ces indices sont constitués par le contexte de l’accord commercial de 2016 et l’absence de réponse de Monoprix sur les quantités à commander, malgré les demandes réitérées du fournisseur, qui a pu se croire conforté dans son prévisionnel par le silence du distributeur et, d’autre part, par les chiffres réalisés en 2015.
Monoprix est condamnée à payer à la société B. la somme de 20.000 € correspondant à cette disproportion.

 

II – DROIT DE L’AGENCE COMMERCIALE

• Cour d’appel, Versailles, 26 juin 2018, n°17/05261

Thématiques : Agent commercial – Pouvoir de négociation – Marge de manœuvre sur l’opération
En l’espèce, une société X avait chargé une société Y de prospecter des clients susceptibles d’être intéressés par les prestations d’une société Z, en contrepartie de commissions. La société Y a demandé au tribunal de dire que le contrat souscrit était un contrat d’agent commercial.
Le premier juge a estimé que les termes du contrat limitaient la mission de la société Y

à une mission de prospection de clientèle, sans possibilité de négociation des contrats, de sorte que la demande de requalification du contrat n’était pas fondée.
Selon la Cour d’appel, le pouvoir de négociation qui caractérise la fonction d’agent commercial suppose un minimum de marge de manœuvre sur l’opération qui doit être conclue. En l’espèce, au vu de la mission de prospection de clientèle, la demande de requalification de la convention en contrat d’agent commercial n’était pas fondée.

 

III – ANTITRUST

• Cour d’appel de Paris, 19 juillet 2018, n°16/01270

Thématiques : Entente horizontale – Echange d’informations – Organisation professionnelle
Par un arrêt rendu le 19 juillet 2018, la Cour d’appel de Paris confirme dans les grandes

lignes la décision n°15-D-19 de l’Autorité de la concurrence qui avait sanctionné les principaux opérateurs du secteur de la messagerie pour des échanges d’informations intervenus dans le cadre de leur syndicat professionnel
Pour consulter la décision : Cliquez ici

• Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 mai 2018, n°16-18.174 et n°16-20.040, Coty

Thématiques : Distribution sélective – Clauses relatives aux limitations des plateformes tierces

Par deux arrêts du 16 mai 2018, la Chambre commerciale de la Cour de cassation confirme l’analyse de la Cour de justice en affirmant que les clauses relatives aux limitations des plateformes tierces, dans un contrat de distribution sélective, n’enfreignent pas les dispositions de l’article 101, paragraphe 1 du TFUE.

 


 

La lettre de l’actualité en droit économique – Pratique restrictives en droit de la concurrence, Droit des contrat & Antitrust.

Grall & AssociésAvocat Droit de la Concurrence

 

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